Une aquarelle hyber originale
La vue de Mareuil sur Lay représentant l’église Saint Sauveur et le château avec en premier plan le Pont Neuf est emblématique de la cité vendéenne et a bien souvent attiré l’œil du peintre ou du photographe en quête d’un beau paysage. Elle fut d’ailleurs l’une des affiches de promotion touristique du département de la Vendée dans les années 80.
L’aquarelle qui illustre le chapitre « Histoires du Pays Mareuillais » de notre site est donc un exemple de ses nombreuses représentations. Il n’est pas rare, en effet, de voir un artiste poser son chevalet en ce lieu. C’était déjà avec envie et admiration qu’enfant j’observais un descendant d’André Astoul, je crois, concentré sur son œuvre au même endroit.
Mais revenons-en à l’aquarelle que je vous présente. Certains observateurs ont certainement remarqué qu’elle est signée R. Delavaud 83. Ce patronyme est très répandu dans la région, et dans le canton. Mais si je vous dis que l’auteur de cette peinture est maintenant membre de l’Académie des Beaux-Arts aux côtés de, entre autres, William Christie, Jean-Jacques Annaud ou Yann Arthus-Bertrand, je devine que votre curiosité est stimulée.
Mon épouse a acheté cette aquarelle de Mareuil sur Lay sur un marché estival de la côte vendéenne en 1984. Son auteur et vendeur était élève des Beaux-Arts de Nantes et signait alors ses œuvres de son second prénom (René) et du patronyme de sa grand-mère paternelle (famille Delaveau ou Delavaud de Château-Guibert)[1]. Mais alors qui est donc ce célèbre Mareuillais ?
Né à Luçon le 12 juillet 1961, Fabrice Hybert a grandi à La Serrie de Château-Guibert où ses parents élevaient des moutons. Il est élu à l’Académie des Beaux-Arts le 25 avril 2018 sous son nom d’artiste : Fabrice Hyber (sans T). Voici sa notice présentée sur le site de l’Académie des Beaux-Arts :
« Né en 1961 à Luçon, Fabrice Hyber est un artiste qui intervient dans des domaines et sur des supports divers tels que le dessin, la peinture, la sculpture ou la vidéo. Marqué par ses études de mathématiques réalisées avant son parcours à l'École des Beaux-Arts de Nantes, il place l’articulation entre l’art et la science au centre de son travail. Son œuvre se présente comme un réseau de ramifications en perpétuel développement : en procédant par accumulations et hybridations, il opère de constants glissements entre des domaines extrêmement divers, s'inspirant de la manière dont se développent les systèmes cellulaires de nombre d'organismes vivants. La réflexion sur l’homme et son devenir face au développement scientifique et aux mutations des espèces est un point focal de son œuvre.
En 1989 naît d’une commande publique L’homme de Bessines, petit bonhomme vert de 86 cm de haut, personnage ordinaire basculant dans l’étrangeté extraterrestre. Installés sur le réseau d’eau de la commune, les « hommes de Bessines » font office de fontaines ; ils se déploient ensuite dans d’autres villes de France puis à l’étranger.
Fabrice Hyber est choisi en 1997 pour représenter la France dans le cadre de la 47ème Biennale de Venise et devient l’un des plus jeunes lauréats du Lion d’Or.
Avec les POFs (Prototypes d’Objets en Fonctionnement), l’artiste déplace la fonction originelle de quantités d’objets familiers empruntés à notre quotidien. Il modifie ainsi la conscience et la pratique que nous avons de ces objets dont les formes nouvelles induisent et génèrent de nouveaux comportements.
2003 et 2004 sont deux années centrées autour de L’Artère, le jardin des dessins, œuvre pérenne créée au Parc de La Villette en commémoration des vingt années de la pandémie du sida.
« Nord-Sud » est le titre de l’exposition proposée en 2005 par l’artiste au Frac des Pays de la Loire, témoin de l’avancée de sa réflexion autour de l’aménagement de la vallée de son enfance. En 2005, il collabore avec le chorégraphe Angelin Preljocaj pour la création de son ballet Les Quatre Saisons (musique de Antonio Vivaldi). En 2006, il présente un ensemble de tableaux et de dessins à la Galerie Jérôme de Noirmont sur le thème du pétrole.
En 2007, il se voit confier la réalisation de la première sculpture contemporaine pérenne du Jardin du Luxembourg : « Le Cri, l’écrit », bronze polychrome de 3,70 m de haut qui commémore l’abolition de l’esclavage.
En 2012, quatre grandes institutions françaises ont mis à l’honneur son travail : le Palais de Tokyo, la Fondation Maeght, le Mac Val et l’Institut Pasteur. »[2]
Fabrice Hyber a fondé UR Unlimited Responsibility, une SARL destinée à favoriser la production et les échanges de projets entre les artistes et les entrepreneurs. Il crée « Les réalisateurs », un programme de formation de jeunes artistes mené en collaboration avec une école d’art et une école de commerce pour accueillir de jeunes talents créatifs et les accompagner pour développer une idée, lui trouver une forme et des moyens.
Dans les années 90, Fabrice Hybert rachète les terres qu’exploitaient ses parents à la Serrie « pour les protéger » et commence avec l’aide de son père à semer (et non planter) plus de 100 000 arbres pour créer une forêt dans la vallée de son enfance. Il va ensuite rechercher dans le monde des lieux aux particularités météorologiques similaires pour y mener la même démarche, notamment au Chili[3].
Hyber appelle ses toiles des « paysages ou paysages biographiques » dans lesquels l’arbre est souvent central, omniprésent. En 2019-2020 il participe avec une communauté d’artistes à l’exposition « Nous les arbres » à la fondation Cartier pour l’art contemporain et en 2020-2021 il expose « Habiter la forêt », Galerie Nathalie Obadia à Paris.
Actuellement, dans le cadre du Grand Paris Express, le futur métro parisien, Fabrice Hyber réalise, en tandem avec l'architecte Jean-Marie Duthilleul, l'œuvre artistique de la gare de Noisy-Champs.[4]
Il y a quelques années, Fabrice Hybert a acheté le logis de la Jacquelinière à Mareuil sur Lay qu’il aménage, comme à la Serrie, en atelier d’artistes, lieu d’accueil et de création. Le promeneur remarquera certainement le couple d'Hommes de Bessines qui en « gardent » le portail d’entrée.
Comme bien sûr Bessines (près de Niort), mais aussi Shanghai, Lisbonne, Tokyo et Londres, Mareuil sur Lay Dissais héberge ses « Hommes de Bessines » à l'entrée du logis de la Jacquelinière.
« Rien n’est définitif, tout est transformable, transformé ; on n’est sûr de rien. Mais quel bonheur d’être sûr de rien puis de pouvoir avoir de l’apprentissage pour pouvoir retransformer le monde. »[5]
[1] Fabrice Hyber dit avoir vendu près de 3000 aquarelles pdt 3 étés pour financer ses études. Conversation avec Fabrice Hyber, L’Entretien Infini, Hans Ulrich Obrist, FIAC, 19 octobre 2019, 2’20/37’57.
https://www.youtube.com/watch?v=rdN6b7L9RfU&ab_channel=FondationCartierpourl%27artcontemporain
[2] https://www.academiedesbeauxarts.fr/fabrice-hyber
[3] L'Entretien Infini - Fabrice Hyber - Conversation avec Hans Ulrich Obrist (FIAC)– 2019, 14’00/37’57. https://www.youtube.com/watch?v=rdN6b7L9RfU&ab_channel=FondationCartierpourl%27artcontemporain
[4] https://www.culture-grandparisexpress.fr/fabrice-hyber
[5] Fabrice Hyber, Web-série Nous les Arbres, épisode 4/5, Fondation Cartier pour l’art contemporain.
Pascal Pallardy, mai 2021
Crédit photos : Pascal Pallardy
Le 1er janvier 2024, Fabrice Hyber est promu chevalier de la Légion d'honneur. (Journal Officiel de la République française du 31 décembre 2023, texte 7/192, Ministère de la Culture)