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 Un archéologue passionné,

Ferdinand Mandin (1850-1921)

« Ferdinand Mandin, posant avec quelques objets de sa collection, et tenant dans sa main une grande hache polie trouvée à l’Ouche du Fort. » Photo de Lina Poumailloux, 1915, publiée dans l’article de Jean-Loïc Le Quellec « Un pionnier de l’archéologie vendéenne : Ferdinand Mandin (1850 – 1921) », Revue de la Société d’Etudes Folkloriques du Centre-Ouest, tome XVIII, N°122, mai-juin 1984, p172.

Ferdinand Mandin (1850-1921), archéologue à Mareuil sur Lay, photo Lina Poumailloux 1915

 

Si nombre de Mareuillais sont capables de situer la rue Ferdinand Mandin[1] dans le Bas-Bourg, peu de personnes sont à même de dire qui il était et ce qui lui a valu que la rue de la cité où il acheta sa « petite maison »[2] en 1879 porte désormais son nom.

Ferdinand Mandin est né à Mareuil sur Lay le 11 avril 1850. Issu d’une famille modeste, il ne fréquentera l’école que pendant trois années. Il va cependant développer un intérêt certain pour l’histoire et la culture en général. En parfait autodidacte, il va entreprendre à partir de la fin des années 1870 de nombreuses fouilles archéologiques dans la région de Mareuil sur Lay. Il découvrira, en autres, 19 sépultures médiévales aux abords de l’église de Mareuil, le site de l’Ouche du Fort au nord-est de Mareuil occupé dès la préhistoire, plusieurs villas gallo-romaines sur l’ensemble du canton.

Voici Comment Ferdinand Mandin se présentait lors de sa première publication dans l’annuaire départemental de la Société d’Emulation de la Vendée en 1881 : « Je ne suis pas un savant en archéologie, pas plus qu’en autre chose. Dans les trois années que j’ai passées, dans mon enfance, sur les bancs de l’école primaire de Mareuil, j’ai tout juste appris ce qu’il faut savoir, quand on aspire, au régiment, au grade de simple caporal[3].

Quoi qu’il en soit, j’aime tout ce qui porte l’empreinte des siècles passés. L’aspect d’un vieux tronc d’arbre crevassé par la foudre, d’une pierre polie et taillée en amande, d’une médaille rouillée, ramassée dans la poussière du chemin, d’un vieux parchemin aux caractères impossibles, affublé dans son vieux style du moyen-âge, me jette dans de profondes rêveries, et me fait éprouver des jouissances telles, que je ne saurais les exprimer, parce que je ne puis les comparer à nulle autre. 

A défaut de science, j’ai tout simplement l’instinct de la chose. »[4]

Mercier ambulant, Ferdinand Mandin consacre ses loisirs à sa passion. Sa rencontre avec l’abbé Baudry, curé du Bernard, archéologue renommé[5], a été déterminante : « Le mardi 22 juillet 1879, après les encouragements que j'ai reçu de la part de Monsieur de Chasteigner[6], de M. Crochet[7] curé de Mareuil, de M. Petit[8] ancien instituteur, je me suis décidé à faire un voyage au Bernard pour rentrer en relation avec le respectable et savant M. Baudry. »[9] L’autodidacte est conscient du chemin qui lui reste à parcourir : « j'étais peu de chose auprès de lui en fait d'archéologie »[10] et va trouver en ce savant un maitre : « je le remerciais et lui serrais la main heureux d'avoir trouvé un aussi bon maitre en archéologie ; je suis partis du Bernard avec mon parrain qui si trouvait cette journée là. »[11]

Au fil des années et de ses découvertes, le chercheur va constituer un véritable musée riche d’un nombre considérable de pièces qui est mentionné dans l’annuaire administratif, statistique, commercial et industriel de la Vendée de 1914, dans la notice descriptive de la cité mareuillaise en ces termes : « Petit musée d’archéologie formé par M. Mandin. » Il comportait au moins selon Jean Loïc Le Quellec 500 à 600 objets de « l’âge de pierre » ; 3 pendeloques-hachettes ; des pointes de flèches en silex ; environ 200 haches polies, dont une centaine pour Mareuil seul ; plusieurs haches et divers autres objets en bronze ; 800 à 900 monnaies dont 300 petits bronzes de Tetricus provenant de Dissais ; 5 fibules, 2 bagues et 3 pointes de flèches en fer provenant également de Dissais ; une petite statuette gauloise en bronze ; des lampes ; une hache en fer et une en bronze, un petit javelot ; une tête en pierre ; etc[12].

 Ferdinand Mandin va échanger une correspondance avec nombres d’érudits, collectionneurs reconnus dans le monde de l’histoire et de l’archéologie tels Raoul de Rochebrune[13], Georges Beauchet-Filleau[14], Amédée de Béjarry[15], René Valette[16], Louis Brochet[17], Marcel Baudouin[18] ; Georges Clemenceau et son fils Michel ont même signé le livre d’or de son musée ! Il faut dire que sa formidable collection attise l’intérêt, voire la convoitise… De condition modeste, Ferdinand Mandin va parfois céder quelques pièces à certains de ces collectionneurs envieux et acharnés. Il décède en son domicile de Mareuil le 26 janvier 1921 ; une grande partie de sa collection sera alors achetée par Lucien Rousseau[19].

 

Ferdinand Mandin avait consigné ses travaux et découvertes dès 1879 dans divers recueils manuscrits qui ont été légués par ses descendants à l’ACPM :

« Histoire du canton de Mareuil » (2 volumes)

« Mes travaux archéologiques »

« Recueil de mes correspondances archéologiques »

« Signatures et appréciations, annotations des personnes qui ont visité ma collection », du 23 avril 1903 au 4 septembre 1920

« Fondation du Musée de l’Ecole Libre des Religieuses de Mareuil »

« Notes généalogiques »

« Ma vie » 2 volumes

                                                                                                                                                      Les mémoires de Ferdinand Mandin,

                                                                                                                                                      deux volumes manuscrits, 266 et 272 p

                                                                                                                                                      Archives ACPM

Nous venons de publier dans le numéro 81 de la revue de l’ACPM « Au fil du Lay »[20] un extrait de ses mémoires transcrites dans les deux volumes intitulés « Ma vie ». Dans ce témoignage, l’auteur, après une courte présentation généalogique, retrace son parcours militaire, de son engagement comme volontaire[21] le 13 août 1870 à son retour dans ses foyers le 13 août 1871. Avec une certaine précision, il y raconte sa période d’instruction militaire, sa montée au combat, les conditions de sa longue période de captivité sur les rives de la mer Baltique. Il y note ses espoirs et appréhensions, y expose ses convictions idéologiques et patriotiques, et enrichit son propos des données politiques et militaires du moment. On y décèle déjà le regard avisé et curieux du futur historien et chercheur ; il émaille son récit de descriptions précises des lieux, des monuments, des faits divers et coutumes qu’il rencontre et peut observer. Ferdinand Mandin, qui ne s’était jusqu’alors guère aventuré au-delà des limites de son canton, nous entraine dans un voyage qui nous mènera d’Angoulême en Poméranie, au nord-est de la Prusse. Dans un souci d’authenticité, la ponctuation et l’orthographe du document original ont été maintenues ; nous avons enrichi le texte de notes explicatives et d’illustrations.

Pascal PALLARDY, avril 2023

                                                           

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[1] Lors de l’attribution des noms de rues en 1982, l’A.C.P.M, membre de la commission municipale, a proposé, en autres, les noms de Ferdinand Mandin et de l’Ouche du Fort.

[2] « Dans l'année 1879 j'achetai une petite maison, sise dans le bas-bourg n'ayant pas de servitudes, mais il est vraie ; qu’un petit chez soi, vaut un grand chez les autres. » Mémoires manuscrites de Ferdinand Mandin, Ma vie, volume 2, p.51, Archives ACPM.

[3] Lors de la conscription, il est classé au 2ème niveau d’instruction : « sachant lire et écrire ». ADV, Registre matricule 1R369, p.160/226. 

[4] Ferdinand Mandin, Rapport sur le vieux cimetière découvert près de l’église de Mareuil-sur-le-Lay, Annuaire départemental de la Société d’Emulation de la Vendée, 1881, 3ème série, volume 1er, p. 179 - 180.

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k208836c/f215.item

[5] « Le seul archéologue vraiment sérieux que compte alors la Vendée » écrira Maurice Maupilier, Trois aigles d’azur au cœur profond de la Vendée, Le cercle d’or, 1980, p.196.

[6] Alfred de Chasteigner, (1813-1887), fit édifier le château de Beaulieu. Il était membre des plus imposés au sein du conseil municipal de Mareuil en 1870 et sera ensuite élu conseiller municipal le 30 avril 1871.

[7] L’Abbé Evariste-Léon Crochet, (1825-1906), curé de Mareuil de 1857 à 1883.

[8] Eugène Petit, (1818-1891), est l’instituteur de l’école communale de garçons de 1852 jusqu’à son départ à la retraite en septembre 1878 ; il est aussi secrétaire de mairie. (Délibérations municipales et arrêtés du maire).

[9] Mémoires manuscrites de Ferdinand Mandin, Ma vie, volume 2, p135, Archives ACPM.

[10] Ibid., p.136.

[11] Ibid., p.137.

[12] Jean-Loïc Le Quellec « Un pionnier de l’archéologie vendéenne : Ferdinand Mandin (1850 – 1921) Deuxième partie, Revue de la Société d’Etudes Folkloriques du Centre-Ouest, tome XVIII, N°125, nov - déc 1984, p 263 - 266.

[13] Le comte Raoul de Rochebrune, (1849-1924), constitua une riche collection de pièces archéologiques, armes médiévales et œuvres d’art en son château de la Court d’Aron à Saint-Cyr-en-Talmondais.

[14] Georges Beauchet-Filleau, (1852-1941), échangea avec Ferdinand Mandin pour la rédaction de la seconde édition du dictionnaire historique et généalogique des familles du Poitou.

[15] Amédée Paul Armand de Béjarry, (1840-1916), sénateur de la Vendée de 1886 à 1916. Il édite en 1884 les «Souvenirs vendéens» de son grand-père, chef vendéen en 1793.

[16] René Valette, (1854-1939), avocat. Il fonde la Revue du Bas-Poitou en 1888.

[17] Louis Brochet, (1847-1933), architecte, agent-voyer à Fontenay-le-Comte. Il publia de nombreux ouvrages, parfois controversés par ses contemporains, sur le Sud-Vendée dont notamment « La Vendée à travers les âges » en 1902 et « Le canton de Mareuil sur Lay à travers l’histoire » en 1911.

[18] Docteur Marcel Baudouin, (1860-1941), de Croix-de-Vie, interne des hôpitaux de Paris, lauréat de la Faculté et de l’Académie de médecine. Il fut l’un des membres fondateurs de la Société Préhistorique Française et président de la Société d’Emulation de la Vendée.

[19] Lucien Rousseau, (1875-1951), maire de Cheffois. Il participe avec Marcel Baudoin à la mise à jour et aux fouilles de l’ossuaire de la Ciste des Cous et de l’allée des Pierres Folles à Bazoges-en-Pareds. Pour en assurer la préservation, il acquiert ce site et en fait don à la Société Préhistorique Française.

[20] « La guerre de 1870 – 1871 : souvenirs d’un soldat mareuillais », Au fil du Lay N°81, revue de l’Association Culturelle du Pays Mareuillais (ACPM), 1er sem 2023, 100 pages. acpm85@gmail.com

[21] Vers 1900, F. Mandin assure les fonctions de secrétaire/trésorier de la 104ème section des Vétérans des Armées de Terre et de Mer 1870 – 1871 de Mareuil sur le Lay. Correspondances de Meynard de La Claye, fonds Mandin, Archives ACPM.

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